Olivier Ker Ourio est un peu une anomalie dans le paysage des harmonicistes
Français : d'abord, il est d'origine réunionnaise, mais surtout, il est arrivé très
tard dans la musique, à 22 ans. Un coup de foudre lui donne l'envie de s'y mettre, et le
chromatique, instrument de sa jeunesse paraît alors un choix naturel. L'avenir lui
donnera raison même si son choix ne lui a pas nécessairement facilité les choses. Olivier a travaillé dur pour trouver sa voie et sa voix sur un instrument qui
somme toute reste peu utilisé dans le jazz. Les pratiquants du chromatique en France sont
d'ailleurs plus de la veine des anciens joueurs de 'variété' à l'américaine que des
véritables jazzmen.
Aujourd'hui, Olivier est bien connu sur la scène jazzistique Française
et il est souvent (peut-être trop ?) comparé à Toots Thielemans. Il a joué et tourné
avec Aldo Romano, Michel Petrucciani et bien d'autres encore. Son style est très fluide
et mélodique, il préfère une approche assez rythmée dans les solos plutôt que du
free, et c'est pas pour me déplaire...
Olivier a collaboré à plusieurs albums de jazz avant de sortir son
premier opus au début de 98. Cet album intitulé 'Central Park Nord' est détaillé
ci-dessous. Un deuxième album est en phase finale et sortira normalement en 99 sous le
titre 'Oté l'Ancêtre'. Le premier album est disponible dans les bacs des grandes
chaînes de distributions genre FNAC ou Virgin.
Central
Park Nord
Il faut tout d'abord vous dire que je ne suis pas un mélomane du jazz,
même si j'y ai mes marques et mes goûts. Qui plus est je n'ai pas eu l'occasion
d'entendre énormément de jazz au chromatique et le seul album de Toots Thielemans que je
possède me laisse assez froid. Je ne savais donc pas du tout ce que j'allais bien pouvoir
penser de cet album d'Olivier. Globalement, j'ai été plutôt très agréablement
surpris.
Nommé d'après le quartier où Olivier a vécu à New York, cet album a un son très
américain qui rappelle certains quartettes de jazz avec saxo ou trompette.
L'orchestration est sobre même si par moments je trouve que le batteur en fait un peu
trop. Ce qui est vraiment très riche, cela dit, c'est l'espace que laisse Olivier à la
fois dans ses solos, qui évitent l'écueil de la verbosité qu'on entend parfois dans le
jazz, et vis à vis des autres musiciens.
Quant au jeu d'harmonica lui-même, il est très expressif et sait être dynamique lorsque
c'est nécessaire. A l'extrême inverse, sur les morceaux lents et/ou mélancoliques,
Olivier ne tombe pas dans le mielleux qui ressort parfois du son chromatique.
Certains morceaux sortent clairement du lot. Je trouve superbe 'Le Grisbi', qui ouvre
l'album et me rappelle un peu Barney Wilen. Le son de l'harmo est clair et très
cristallin, les impros sobres et pleines de goût. Je craque aussi pour 'Fifi à donf',
une compo au rythme swinguant à laquelle l'harmo semble tout particulièrement adapté.
D'une manière générale, les amateurs de jazz, se retrouveront aisément dans cet album,
mais il reste tout à fait abordable pour des amateurs d'harmo ou même des gens qui
apprécient la musique sincère.
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